Une expérience...

Bonjour à tous,

Je viens de rentrer de 3 semaines de séjours adapté pour adultes en grande dépendance. Il s'agissait de ma première expérience même si j'avais travaillé il y a quelques années (et très peu de temps) avec des adultes déficients intellectuels, aucun d'eux n'était énurétique ou encoprésique, et tous étaient valides (une seule était en fauteuil me semble-t-il, et seulement pour les grandes balades).

Pendant ces 3 semaines j'ai rencontré une quinzaine d'adultes handicapés physiques et/ou intellectuels, et j'en ai pris plein la tronche.

J'avais envie de faire partager mon ressenti alors voilà :

Beaucoup d'appréhension avant de partir : avec qui vais-je partir ? mes collègues vont-ils être sympas ? allons-nous être sur la même longueur d'ondes ? bref toutes ces questions dont les réponses sont essentielles pour passer 3 semaines ensembles dans de bonnes conditions... et puis surtout le public en "grande dépendance", ça veut dire quoi "grande dépendance" ? il va falloir faire des toilettes c'est sûr, mais quoi d'autre encore ? comment vais-je gérer le handicap ? et intellectuellement, physiquement, il sont capables de quoi ? et moi, est-ce que je vais tenir le coup physiquement, psychologiquement ? Quelles activités sont possibles ? Et puis le lieu, est-ce qu'on va être bien installé ? bien accueilli ? les lieux sont-ils bien adaptés ?

Enfin voilà une partie des mille et une questions qui me sont passées par la tête avant de partir.
De plus, en faisant connaissance avec les collègues un peu avant via internet, il se trouve que très peu avait une expérience de ce type, bonjour l'angoisse... et bien, je ne sais pas si c'est justement ça qui nous a lié, mais quel soulagement au bout de 3/4 jours quand nous nous sommes rendus compte respectivement que "quelque chose" se passait dans cette équipe, et que ce quelque chose était incroyablement positif !

Je dis 3/4 jours, parce que personnellement, les 2 premiers jours, je me suis demandé si j'allais tenir le coup !

Nous avions roulé, le premier jour, toute la journée, le départ avait été un peu foulli, voire bordélique ; sur les aires d'autoroute, il faut s'activer, faire manger les vacanciers, les emmener aux toilettes, changer les couches ; nous sommes arrivés très tard, et là, il faut encore faire les lits, faire prendre des douches pour certains, petite toilette pour d'autres ; et à 1h du mat, t'es pas couché, t'es debout depuis 4h30 du mat, t'es épuisé et tu sais qu'il faut être debout vers 7h00 le lendemain parce qu'on ne connait pas encore les habitudes de réveil des vacanciers.

Et le lendemain matin, c'est la plongée fracassante dans le quotidien, les réveils qui doivent enchaîner directement sur la douche parce que la couche était mal mise, ou n'est pas de bonne qualité, ou simplement a saturé.
Le petit déj, qui mange seul ? qui mange mixé ? à tiens pour untel, c'est une paille pour boire, ah et pour untel, il faut faire gaffe, sinon, il s'enquille le thermos de café à lui tout seul...
Et les levers, les douches : "vite vite les collègues, comment on fait pour tenir un adulte qui ne tient pas sur ses jambes ?" "ben ça dépend" "comment ça, ça dépend ??!!!!" "tiens pour untel, une seule personne suffit, ouais mais pour un autre, il faut être 3 voire 4 !" " et mais qu'est-ce que c'est que ça ??? " "ben un penilex" " oulala, c'est quoi un penilex ? ça se met comment ?" ""c'est une sorte de préservatif relié à une poche d'urine""ah ok, et ça, c'est donc la chaise percée, ok, mais c'est vachement haut !" "allez,on lève à 3, un, deux, trois !"

Et petit à petit, tout ça se cale, nous prenons nos repères. Et puis surtout, tout ça s'est fait dans une grande humilité m'a-t-il semblé.
Toutes nos maladresses, nous les avons exposées très honnêtement aux vacanciers, nous leur demandions systématiquement comment faire, comment eux avaient l'habitude d'être porté, si nous leur faisions mal en les portant comme ci ou comme ça, s'ils aimaient être couchés comme-ci ou comme-ça...
Elles n'ont pas été cachées, aucun d'entre nous n'a voulu joué au super héros, nous les avons évoqué honnêtement et avec humour aux vacanciers concernés.
Même pour ceux qui communiquaient peu, ou pour lesquels nous n'avions pas trouvé de "mode" de communication. Nous parlions beaucoup, nous expliquions nous aussi ce que nous faisions, posions des questions aux vacanciers, même si nous savions que nous n'aurions pas de réponse, nous ne savions même pas parfois si la personne avait compris la question, certainement que oui... peut-être que non...

Et puis, certains d'entre-nous avaient quand même de l'expérience, nous nous sommes donc appuyés sur ces expériences. Mais tu te rends compte que chaque situation, chaque personne, est tellement différente, que ce qui est valable pour l'un, ne l'est pas pour l'autre.

Et puis il y a la fatigue, physique, psychologique. Parfois, tu réveilles le vacancier de la sieste, et tu te rends compte que le lit est trempé (au mieux...) ... tu sais qu'il faut le lever, le nettoyer, le changer, virer les draps, pour la 2ème fois de la journée... et tu as ton petit diable dans la tête que te dis "allez, c'est pas grave, pour une fois, tu laisses comme ça, t'es trop fatiguée pour faire ça..." et ce que j'ai trouvé génial, c'est que ton petit ange qui te dis " il faut le faire, c'est essentiel" est soutenu par les autres petits anges des collègues, qui eux aussi on leur petit diable qui les titille, parcequ'on est tous fatigués, mais qu'on sait tous pourquoi on est là !

Voilà, cette expérience a été riche, très riche en émotion, en sentiments, en liens, en communication, en évènements... Nous avons vécu des choses très très fortes pendant ces 3 semaines. Hier dans le train du retour, je me suis retrouvée seule, à écouter de la musique, pendant un peu plus d'une heure, je crois que c'était la première fois depuis 3 semaines !
Et je passais par la joie de rentrer chez moi, par la nostalgie du séjour, par la tristesse liée à ce vacancier qui a profité de ses vacances pour ne pas se réveiller un matin, par l'amertume de ne pas avoir passé plus de temps avec un autre pour tenter comprendre cette angoisse qui s'exprimait très violemment... tout ça se bousculait et me traversait la tête d'une seconde à l'autre, et c'est encore le cas aujourd'hui.

Alors pour terminer, je voudrais dire merci, merci aux vacanciers, merci aux 8 collègues, merci au patron du village vacances, merci au cuistot, merci à la cuistote, merci à la femme de ménage, merci aux collègues des 2 autres séjours (en particulier pour ceux du CAT qui nous ont vraiment beaucoup soutenu, respect ! ), merci aux vacanciers de ces 2 séjours, merci aux personnes qui nous accueillies dans les bistrots, dans nos sorties... et merci à l'UFCV et ses référents qualité qui, malgré cette dénomination pas jolie jolie, le sont de qualité !

Merci à toi pour ce récit, et cette humilité partagée...

J'ai été par contre très surprise par l'histoire du vacancier qui ne s'est pas réveillé... comme je ne veux pas remuer le couteau dans la plaie, je ne poserai pas toutes les questions qui m'agitent à ce sujet, mais pour moi ce n'est pas anodin.

"Les vacanciers" ? D'après ton récit ça n'a pas grand rapport avec des vacances.
Ton histoire d'handicapés physiques/mentaux (on ne sait plus ?) est un beau cauchemar. Comment se remettre d'une telle aventure ?
C'est bien de partager ton histoire. Du positif, un peu mais pas plus que sur un champ de bataille. Pas de quoi donner envie de s'enrôler.

Cet avis n'engage que moi. Bien sûr.

Bonjour,

Merci Macha. Il n'y a aucun problème, mais je n'ai simplement pas voulu m'étaler à ce sujet, je n'avais pas envie d'être trop précise dans le récit de ce séjour. Pour faire court, l'un des vacancier est décédé de mort naturelle pendant le séjour. Cela a été très difficile à gérer sur le moment, mais ne nous a pas empêcher de continuer. Je suis beaucoup plus à l'aise aujourd'hui face à cet évènement, simplement je n'ai pas envie d'en parler en détail sur un forum. Mais si vraiment des questions te taraudent, tu peux le faire en MP.

mbd758, j'avoue être un peu décontenancée par ton message...
Mais en relisant le mien, je me rends compte en effet que je parle beaucoup des difficultés rencontrées.
Alors sans vouloir faire d'analyse de forum (enfin un peu quand même), je dirais que c'est certainement parceque c'est ce qui m'a le plus inquiété avant et pendant le séjour, c'est aussi ce qui nous prenait le plus de temps.

Mais je te rassure, il s'agissait de vraies vacances, où chacun se réveillait à l'heure qu'il voulait, faisait les siestes qu'il voulait, participait sur place aux activités qu'il voulait. Nous faisions pas mal de sorties collectives quand même, nous nous sommes baignés, nous avons visité un tas de lieux tous aussi chouettes les uns que les autres, nous avons pris des temps calmes pour faire des soins du visage, des mains, des pieds, enfin nous avons fait ce qui peut se faire sur un séjour d'animation.

Handicapés physique/mentaux : ben oui... parfois c'est l'un, parfois c'est l'autre, parfois ce sont les 2, parfois plus l'un que l'autre... je peux difficilement être plus précise, si ce n'est qu'il ne s'agissait pas de personnes accidentées (de la route par exemple), pour certains, il s'agissait de grands prématurés, mais je ne peux vraiment pas t'en dire plus.

Enfin, non ce n'était pas un cauchemar, mais c'est vrai là aussi, que quand je me relis, ça ne semble pas très positif...

D'un autre côté c'est la réalité de l'animation en séjour adapté, et si j'ajoute que je suis payée 31,90€/jour pour 10h à 15h00 de taf/j, avec le 15 août qui à priori ne nous sera pas payé parce que "journée de solidarité", que nos 2 jours de congés sur 3 semaines ne sont pas payés non plus... Mais, je me répète, c'est la réalité et il faut savoir où l'on va quand on s'engage sur un séjour de ce type.

C'est intéressant que tu me dises tout ça, parce que depuis que je suis rentrée et que j'ai écrit ce message, ce ne sont pas ces moments là qui prennent le plus de place dans ma tête, je ne pense qu'aux moments d'échanges, de rires et ça des rires, des fous rires, je peux te dire qu'on s'en est payés un paquet. Je pense aux moments où nous avons trouvé un moyen de communiquer avec untel, au signe d'au revoir de l'un d'entre eux, qui fut le seul signe "gratuit et désintéressé" pendant ces 10 jours...

Mais tout ces moments là sont difficiles à décrire...

Alors pour terminer, je voudrais simplement dire que participer à un séjour adapté avec des personnes en grande dépendance est loin d'être simple physiquement et psychologiquement mais c'est une expérience incroyable et bouleversante et magnifique.

Et Mbd, n'hésites pas à donner ton avis ! C'est important d'avoir des retours, de comprendre un peu comment les autres perçoivent ce que j'ai voulu exprimer.

Je trouve ça très intéressant d'avoir ton témoignage meliecara (j'insiste ;-) ), comme je trouve toujours très intéressant de parler avec les infirmières lors des séjours de mes enfants à l'hôpital.

C'est en comprenant mieux le ressenti du personnel de santé et de soins, que je trouve plus facile d'expliquer à mes enfants ce qu'ils peuvent attendre des personnes qui s'occupent d'eux, ce qui leur est dû, comme ce qu'ils doivent.

C'est loin d'être simple car cela ne fait pas partie du package de l'éducation "standard". J'ai toujours essayé d'expliquer en détail à mes enfants qu'ils doivent s'exprimer, dire ce qui leur plaît et ne leur plaît pas, dire leurs douleurs et leurs gênes, mais dans le respect de la personne qui fait les soins et dans le respect des différences entre ces personnes.

Certains vont faire un geste comme ci, d'autres vont faire un geste comme ça, et dans tous les cas il faut garder une bonne qualité de dialogue (mais j'ai l'avantage d'avoir des enfants qui n'ont aucun problème de communication).

De même le dialogue entre moi, la mère, et les "professionnels de santé", n'est pas toujours facile non plus, et ça m'intéresse de mieux comprendre mes interlocuteurs potentiels....

Je suis contente que ce séjour t'ait autant apporté sur le plan humain. Je déplore par contre qu'il ait été aussi mal payé, car je pense que ta profession devrait être mieux reconnue, socialement et financièrement.

J'attends encore quelques années avant de tenter la colo pour mes enfants, et déjà, j'appréhende (à tort probablement) ;-) !

meliecara, je comprends très bien. Beaucoup d'émotions et seulement quelques lignes pour exprimer tout ça.

En définitive, c'est le rapport au handicap qui me pose toujours un peu problème. Cette difficulté à hiérarchiser les pathologies et à réunir toutes les difficultés physiques ou mentales sous la même bannière. D'un côté ça simplifie grandement le travail d'investigation nécessité par la multitude et de l'autre ça amène une série d'amalgames qui piège l'handicapé dans un état de dépendance puisque par définition il le devient.
Probablement qu'en mélangeant les pathologies (physique/mentale/les deux) on nivèle par le bas sans s'en rendre compte.

Je suis en pleine digression. Ton intention n'est pas là et d'ailleurs le débat non plus. Juste que ton expérience m'a pousser à cette réflexion.

Mbd, tu disgresses peut-être, mais c'est loin d'être inintéressant !

J'avais, en arrivant, un tas de questions sur la nature, la forme, les causes, les conséquences des "handicaps" que j'allais rencontrer. J'ai toujours ces questions d'ailleurs. Je n'ai pas cherché à y répondre tant que ça quand j'y pense...
Ce que j'ai réalisé en revanche, c'est que chaque individu est foncièrement différent (cela parait un peu naïf comme réflexion, nous sommes tous bien sûr différents mais je vais essayer d'être plus précise) et que finalement, peu importe dans quelle case tu classes le handicap en question.
Je pense que c'est lié au contexte : sur un séjour de vacances adapté, tu cotoies les personnes pendant très peu de temps, tu dois donc dans un premier temps et rapidement te focaliser sur l'essentiel : le soin, l'hygiène, la protection.

Ces éléments deviennent des outils de communication avec la personne et de compréhension de la personne. Ensuite seulement viennent les activités, qui là aussi seront des outils de travail essentiels.

Et c'est bien là que tu te rends compte qu'à pathologie (ou symptôme, je ne sais pas trop comment dire) "sensiblement" égale tu ne fonctionneras pas de la même manière avec l'un comme avec l'autre.
Un exemple, en milieu de séjour la majorité des vacanciers sont partis et d'autres sont arrivés, et là, personne ne peut s'empêcher de faire des comparaisons avec les précédents, sauf que tu te rends vite compte que ce que tu faisais avec telle personne, tu ne peux pas le faire avec l'autre même si elles semblent être "dans la même case".

Il est possible en effet que nous nivelions par le bas en faisant l'amalgame et en étant généraliste, mais la classification est tout aussi dangereuse. Dire d'un individu qu'il a tel handicap implique pour moi forcément et inconsciemment une "marche à suivre". Je ne sais pas si je suis très claire...

Ensuite, il y a de ma part un manque de connaissance théorique sur le sujet indéniable ! J'en saurais (j'espère !) un peu plus dans quelques années, je rentre en formation d'éducateur spécialisé en septembre, je pourrais donc creuser un peu plus ce domaine et être plus précise.
Mais j'ai aimé cette approche "globale" qui m'a permis de découvrir chaque personne dans son individualité sans la mettre dans une case, sur une ligne de classification... cela m'a peut-être ammené à passer à côté de certaines choses ou à prendre plus de temps pour en comprendre d'autre, je ne sais pas...

Le débat sur la classification des maladies mentales, du handicap est je crois très intéressant et très brûlant à la fois et je ne suis pas encore très à l'aise avec ce sujet.

Macha, ce séjour était un séjour d'animation, et dans l'animation socio-culturelle, les salaires sont purement et simplement scandaleux ! Et que tu fasses une colo avec des touts petits, avec des ados en camping, avec des adultes handicapés, c'est la même !
Le seul avantage (en dehors de ce que chacun en retire personnellement) que j'y vois, c'est que du coup, peu de gens font ça pour l'argent. Alors bien sûr, cela n'empêche pas les disfonctionnements, et certains séjours ne se passent pas toujours très bien il faut le savoir. Il suffit parfois d'une personne dans l'équipe pour foutre en l'air tout un séjour, pour démotiver tout le monde, créer des tensions...
Je ne dis pas ça pour te faire peur tu t'en doutes, mais il faut le savoir. Il y a des c... partout comme on dit.
Il y a cependant des organismes "reconnus" (comme l'UFCV, les autres, je ne sais plus), et il suffit d'aller faire un tour sur les forums, de chercher "séjours adaptés" pour pouvoir lire quelques témoignages. Ceux-ci ne sont pas à prendre forcément au pied de la lettre, mais cela peut donner des pistes, des idées de structures...

Et puis tu as tout à fait raison de chercher à en savoir plus sur les personnes qui, entre autre, travaillent avec tes enfants. Il y a trop des parents qui ne le font pas, et d'un autre côté, trop de professionnels que ça fait ch...
Nous sommes pourtant tous là dans le même intérêt : le bien-être de la personne.
Mais c'est malheureusement aussi le cas dans les différents corps de métiers qui gravitent autour de la santé, du social. L'éduc critique l'assistante sociale, qui en fout plein la tronche des parents, qui en veulent à l'instit., qui lui même se demande ce que foutent les éducs... c'est le serpent qui se mord la queue quoi...
Chacun croit mieux faire que l'autre, c'est ridicule.
Fort heureusement, certaines équipes pluridisciplinaires dépassent ce clivage et arrivent à fonctionner très bien, prennent en compte l'environnement "non-professionnel" de l'individu (les parents, la famille, les amis, les loisirs...).
Allez, encore un exemple, avant de partir on m'avait "prévenu" que l'une des personne dont je serai référente avait un papa un peu ch..., qui savait mieux que tout le monde ce qui était bien pour son enfant.
J'ai pris le temps de discuter avec lui, longtemps, alors c'est vrai que c'était un peu ch... parce que beaucoup de détails, de précisions, de choses qui semblaient insignifiantes, mais c'était tellement important pour lui.
J'ai fait mon possible pour le rassurer, je me suis rendue disponible pour lui tout au long du séjour et il n'y a eu aucun abus de sa part. Il a compris que j'avais besoin de certains de ses conseils mais qu'en même temps, j'avais suffisamment de jugeotte (et que nous étions une équipe, je n'étais pas seule) pour faire les choses de moi même en toute sécurité.
Si j'avais envoyé balader ce monsieur en lui disant de but en blanc "je sais ce que j'ai à faire" il n'y a aucun doute que le séjour se serait mal passé pour cette personne. Son bien-être dépendait en grande partie de la relation que j'avais avec son père.

Voilà encore une situation particulière, nous n'aurions pas pu fonctionner de la même manière avec une autre personne ayant "le même handicap" mais n'ayant pas la même histoire familiale.

Je suis contente que ce message amène toutes ces discussions, cela me permet de voir les choses avec plus de recul, d'être un peu moins "la tête dans le guidon".
Merci

Bonjour Melie, future collègue normande.

Je n'ai jamais eu l'occasion de travailler en séjour adapté... Je n'ai aucune formation en animation (même pas le BAFA, à force de me tâter pour savoir si je le passais ou pas, ben, je ne l'ai toujours pas...)... Mais cela m'a toujours attirée d'imaginer des personnes handicapées en dehors de leur contexte de vie quotidienne, tout comme les animateurs... Je reste persuadée que le facteur dépaysement entre vraiment en ligne de compte et rafraîchit en quelque sorte l'image de la personne handicapée. Les "vacances", les loisirs, être amené à cotoyer la personne dans un contexte plus festif, joyeux, est un excellent moyen d'atténuer l'image du handicap, une image qui peut être assez violente quand on ne connait pas du tout ce que c'est.

Melie, tu avais une expérience de quel type dans le domaine du handicap ? Tu as eu un petit débriefing de la part de l'UFCV avant le séjour ? Quels ont été les outils qui t'ont servi à connaître les vacanciers (fiches synthétiques...) ?

Je bosse pour une semaine encore dans une association qui accompagne notamment des étudiants sur le campus, en milieu professionnel (stage), mais aussi dans les loisirs, et là, ces temps-ci j'accompagne une petite fille en centre de loisirs. Je suis assez effarée de constater qu'il n'y a aucun papier décrivant en trois mots l'enfant, et les difficultés qu'il rencontre...

Je viens de discuter avec une amie qui revient de séjour adapté. Même combat, certains vacanciers étaient littéralement livrés avec des médicaments sans ordonnance, un peu du grand n'importe quoi...

Je te rejoins du coup, Melie, et Mbd, en disant qu'il faut être vigilant sur les différentes associations proposant des séjours adaptés, certaines ont une organisation catastrophique...

Salut Sifoell,

J'avais travaillé il y a 5 ans pendant 15 jours auprés d'adultes déficients intelectuels, mais ils étaient en mesure de se déplacer et étaient autonomes pour les pipis/cacas. Au point de vue formation, j'ai un BEATEP, mais rien de spécifique dans le champ du handicap.

La directrice qui nous a recruté avait fait plusieurs séjours adaptés auparavant, elle a été très disponible pour chacun de nous avant le séjour pour toutes nos questions. Aucune de nos questions ne nous donnait l'impression d'être ridicule, et nous pouvions vraiment lui demander n'importe quoi.

Il y a eu 2/3 jours de formation en juin je crois, mais ça n'était pas possible pour moi de me déplacer à ce moment là (il me semble que seuls 2 d'entre nous on pu s'y rendre). Je sais que lors de cette mini-formation, ils ont par exemple appris à mettre une couche à un adulte, à prendre une bonne position avec le bassin pour lever une personne, le reste, je ne sais pas.

Nous avions des "dossiers vacanciers". La directrice nous avait synthétisé les informations de ces dossiers : la personne est-elle énurétique, encoprésique, mange-t-elle mixé, a-t-elle peur de l'eau, des animaux, prend-elle une position particulière pour dormir, va-t-elle aux toilettes sur une chaise perçée, à des moments précis ou non, communique par cri ou par geste, s'exprime difficilement mais préfère répéter 15 fois pour être comprise et d'un autre côté toutes les infos qui concerne plus la personnalité : timide, angoissée, bavarde, accaparante, capable de faire des choix, aime le sport, l'art plastique...

Mais cela n'empêche pas les bugs, l'une de nos vacancière est arrivée sans dossier, (notre directrice a pu se mettre en contact avec son foyer quand même), quand aux médicaments et ordonnances c'est arrivé aussi. Entre l'ordonnance qui manque, le pillulier inexistant, ou celui qui se renverse... Dans ce cas, c'est coup de fil à l'institution d'accueil, ou aux parents et direction l'infirmière du coin voire le médecin.

Pour revenir au dossier, ça peut être un piège... Nos informations étaient très "techniques", définissaient l'autonomie de la personne, ses problèmes de santé, ses phobies et ses loisirs et c'était largement suffisant.
Aucune info sur l'origine, la nature du handicap, porte-il un nom..?
Mais franchement, ça, ça n'a eu aucune importance, surtout pour 3 semaines. Cela ne m'aurait rien donné de plus je crois.

Le piège du dossier est d'avoir ensuite une idée préconçue, qui se cache dans un petit coin du cerveau et qui joue sur notre conception propre de la situation.

Le tout je pense est de faire le tri des informations importantes en fonction du contexte.

J'avais fait une colo, il y a pas mal d'années avec des jeunes de 6-12ans. Nous avions avec nous un frère et une soeur qui étaient dans une situation familiale "compliquée". Un soir, la petite soeur pleure parce que sa maman est morte il y a quelques temps déjà. J'en ai alors voulu au foyer de ne pas m'avoir transmis cette infos, pensant que j'aurai pu gérér la situation en le sachant (il y avait aussi d'autres évènements mais j'avoue que je ne m'en souviens plus).
Avec le recul, j'ai compris qu'il y a avant tout une notion de confidentialité (du moins de discrétion) de la part de l'institution mais aussi que la vie, c'est être confronté à des gens "qui ne savent pas".
Si j'avais su, j'aurais apporté quoi de plus réconfortant à cette gamine ? rien j'en suis sûr. En revanche, j'aurai pu, sans le vouloir chercher à éviter le sujet, et là, c'est le cauchemar pour tout le monde.

Tout ça pour dire qu'il faut bien "cibler" les infos dont on a besoin en fonction de la situation, du contexte.

Sifoell, ce manque d'info t'a-t-il vraiment empêché de travailler avec cette petite fille?
Mais si tu ressens vraiment le besoin d'avoir des infos, si tu penses qu'elles te sont nécessaires pour mieux avancer, alors essaye d'aller les chercher.
Entre en contact avec les parents si c'est possible, vois si d'autres anims la connaisse déjà, à la rentrée vois ses anciens profs... Place-toi comme une "professionnelle cool" qui demande des infos à un autre "professionnel cool" et tu devrais en savoir un peu plus. Je dis ça, parce que tu sais bien que dans ce milieu (comme je l'ai dit plus haut) les corps de métiers ne sont pas toujours "cool" entre eux.
Mais tu as bientôt fini...c'est peut-être un peu tard.

Et bien justement ! dans quelques semaines (attends d'être suffisament sortie de ce boulot et d'être passée à autre chose), fais le bilan de ton travail avec cette petite et essaie d'imaginer ce que tu aurais pu "faire de mieux" si "tu avais su"...